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MAISON POUR LA SCIENCE EN MIDI-PYRENEES Le Cristal et ses Réseaux Intervenants Bénédicte de Bonneval Jean-Claude Daran Directeur de recherche émérite au Laboratoire de Chimie de Coordination Président de l’association « Les cristallographes en Midi-Pyrénées » Plan I- Introduction : le cristal un peu d’histoire II- Le cristal 1. Ses caractéristiques 2. La maille élémentaire 3. Les symétries 4. Le réseau cristallin III- Diffraction des Rayons X IV- La cristallographie dans notre vie quotidienne V- Conclusion I - Introduction Le cristal Krystallos désigne la glace en grec. Strabon (64 av JC- ca 24, géographe grec) nomme « krystallos » (glace) le quartz, minéral transparent. Le nom de quartz a été donné à la gangue accompagnant les filons métalliques, par les mineurs saxons, à la fin du moyen-âge. Cristallographie : terme introduit en 1723, par le savant Maurice-Antoine Capeller (1685-1769). Au cours du 18ème siècle le terme de cristal remplace celui de pierre angulaire. Les cristaux géants de la grotte de Naïca, au Mexique (1999) I - Introduction Le cristal et l’antiquité I - Introduction Le cristal… objet symbolique Le diamant (d’après l’exposition « Voyage dans le Cristal ») Son nom vient du grec « adamas »: indomptable Pierre extrêmement dure, difficile à tailler I - Introduction Le cristal… médicament au Moyen-Age Dans « De lapidibus », l’évêque Marbode de Rennes (1053-1123) expose « la vertu »propre à chaque pierre et un supposé usage médical II – le cristal 1. Ses caractéristiques : sa forme Deux écoles de pensées aux 16ème et 17ème siècles: L’école aristotélicienne: La forme du cristal (cause matérielle) est définie par une cause extérieure (cause efficiente) Aristote : philosophe Grec (384-322 avant J.-C.) 4 causes : cause matérielle, cause efficiente, cause formelle et cause finale Nouvelle école : cause interne au cristal II – le cristal 1. Ses caractéristiques : mesure des angles II – le cristal 1. Ses caractéristiques : formé de molécules intégrantes II – le cristal 1. Ses caractéristiques C’est en 1849 qu’Auguste Bravais énonce le postulat qui constitue la base de la cristallographie : « Etant donné un point P, quelconque dans un cristal, il existe dans le milieu, une infinité discrète, illimitée dans les trois directions de l’espace de points, autour desquels l’arrangement de la matière est la même qu’autour du point P » De ce postulat résulte la notion de réseau tridimensionnel cristallin et toutes les propriétés de symétrie qui en découlent Cristal : constitué par la translation (périodicité) dans les trois directions de l’espace, d’un motif élémentaire. II – le cristal 2. La maille élémentaire : un réseau tridimensionnel c α b γ β a maille = parallélépipède caractérisé par -les vecteurs a, b, c -les angles α = (b, c), β = (a, c) et γ = (a, b) à l'extrémité de chaque vecteur du réseau on a un nœud II – le cristal 3. Les symétries Dans la seconde moitié du XIXème siècle, des mathématiciens tels que C. Jordan (fran.), L. Sohncke (all.), A. Schönflies (all.) et E. Stepanovic (russe) proposent une description de la structure cristalline (maille + motif) basée sur ses SYMETRIES Symétries compatibles avec la périodicité : rotation d’ordre 2 (rotation de 180°), d’ordre 3 (rotation de 120°), d’ordre 4 (rotation de 90°) et d’ordre 6 (rotation de 60°) II – le cristal 4. Le réseau cristallin : empilement de prismes Cette notion de constituant élémentaire définie par R. J. Haüy sera ultérieurement appelée unité de base ou maille élémentaire du modèle atomique cristallin. Ce sont des prismes de formes géométriques simples possédant deux bases identiques parallèles entre elles et dont les faces latérales sont des parallélogrammes Il n'existe en fait que sept types différents de prismes qui sont susceptibles d'être empilés sans laisser de vide entre eux, en d'autres termes remplissant exactement l'espace. Ces sept types de prismes constituent les polyèdres élémentaires des sept systèmes cristallins. II – le cristal 4. Le réseau cristallin : les 7 systèmes cristallins Quels sont les différentes possibilités pour ces six paramètres? Triclinique a≠b≠c α ≠ β ≠ γ ≠ 90° Monoclinique a≠b≠c α = γ = 90°; β ≠ 90° Orthorhombique a≠b≠c α = β = γ = 90° Quadratique (Tetragonal) a=b≠c α = β = γ = 90° Rhomboédrique (Trigonal) a = b = c α = β = γ ≠ 90° Hexagonal a=b≠c α = β = 90°; γ = 120° Cubique a=b=c α = β = γ = 90° II – le cristal 4. Le réseau cristallin : la maille triclinique a≠b≠c α≠β≠γ La moins symétrique 1 centre de symétrie Turquoise : Phosphate basique hydraté d'aluminium et de cuivre Cu Al6(OH)8(PO4)4 4H2O Disthène : silicate d'aluminium Al2(SiO5) II – le cristal 4. Le réseau cristallin : la maille monoclinique b a≠b≠c α = γ = 90°; β ≠ 90° β a c Éléments de symétrie : - 1 axe de symétrie 2 avec 1 miroir ⊥ - 1 centre de symétrie Malachite : carbonate basique de cuivre Cu2(OH)2CO3 Azurite : carbonate basique de cuivre Cu3CO3(OH)2 Malachite II – le cristal 4. Le réseau cristallin : la maille orthorombique a≠b≠c α = β = γ = 90° c Éléments de symétrie : - 3 axes de symétrie 2 ⊥ entre eux - 3 miroirs ⊥ entre eux et aux axes 2 - 1 centre de symétrie b a Topaze : silicate d'aluminium Soufre avec fluor Al2(SiO4)(F2OH2) II – le cristal 4. Le réseau cristallin : la maille quadratique a=b≠c α = β = γ = 90° c Éléments de symétrie : - 1 axe de symétrie 4 avec un miroir ⊥ - 4 axes de symétrie 2 avec 4 miroirs ⊥ - 1 centre de symétrie b a Anatase :TiO2 Zircon : Zr(SiO4) II – le cristal 4. Le réseau cristallin : la maille rhomboédrique Vue suivant l’axe 3 a=b=c α = β = γ ≠ 90° Éléments de symétrie : - 1 axe de symétrie 3 - 3 axes de symétrie 2 avec 3 miroirs ⊥ - 1 centre de symétrie Les corindons Al2O3 Saphir Rubis Al2O3 + Ti O2 Al2O3 + Cr2O3 II – le cristal 4. Le réseau cristallin : la maille hexagonale a=b≠c α = β = 90° ; γ = 120° Éléments de symétrie : - 1 axe de symétrie 6 avec 1 miroirs ⊥ - 6 axes de symétrie 2 avec 6 miroirs ⊥ - 1 centre de symétrie Les Béryls : Al2(Be3Si3O18) Héliodores Rostérites Émeraude : Be3(Al,M)2(SiO3)6 (M = Cr, Fe, V) Aigue-marine II – le cristal 4. Le réseau cristallin : la maille cubique a=b=c α = β = γ = 90° Éléments de symétrie : - 3 axes de symétrie 4 avec 3 miroirs ⊥ - 4 axes de symétrie 3 - 6 axes de symétrie 2 avec 6 miroirs ⊥ Sel de cuisine : NaCl Diamant Pyrite : FeS2 III – Diffraction des rayons X La DIFFRACTION des RAYONS X Les avancées majeures de 1912 et 1913 Qu’est ce que la diffraction ? Qu’est ce que l’espace réciproque?? III – Diffraction des rayons X Les rayons X Wilhelm Conrad Röntgen (all.) (1845-1923) Découverte en 1895 par Röntgen, d’un rayonnement inconnu d’où le nom de : « Rayons X » tube de Crookes Rayonnement invisible produit par le tube de Crookes qui fait fluorescer un carton couvert de platinocyanure de baryum Prix Nobel de Physique en 1901 « en reconnaissance des services extraordinaires qu’il a rendus en découvrant les remarquables Rayons X » Radiographie de la main d’Anna B. L. Röntgen prise le 22 décembre 1895 III – Diffraction des rayons X Spectre électromagnétique III – Diffraction des rayons X La découverte Munich, 1912 Institut de Minéralogie et de Cristallographie ⇒ Cristaux et connaissance des cristaux Institut de Physique Expérimentale dirigé par W. C. Röntgen (rejoint Munich en 1900) ⇒ Rayons X Institut de Physique Théorique dirigé par A. Sommerfield (rejoint Munich en 1909) ⇒ Propagation des ondes électromagnétiques Le café Lutz III – Diffraction des rayons X La découverte Sous la direction d’A. Sommerfield, P. P. Ewald prépare une thèse sur le passage d’une onde lumineuse au travers d’un cristal et la compréhension de la double Paul Peter Ewald (1888 – 1985) réfraction. Arnold Sommerfield (1868 – 1951) Début 1912, Ewald ayant obtenu des résultats surprenants en discute avec Max Von Laue. Laue suppose alors que les effets d’interférences observés pourraient être liés à la longueur d’ondes de la radiation incidente lorsqu’elle s’approche de l’espace interatomique dans le cristal. D’où l’idée de Laue de soumettre le cristal aux Rayons X. III – Diffraction des rayons X La découverte Les protagonistes de la découverte de la diffraction des rayons X par les cristaux M. Laue, théoricien (1879-1960) rejoint Munich en 1909, assistant de Sommerfield. Prix Nobel de Physique en 1914 « pour sa découverte de la diffraction des rayons X par les cristaux » Wilhelm Friedrich, expérimentateur (1883-1968) Etudiant en thèse dans le laboratoire de Röntgen jusqu’en 1911, assistant de Sommerfield en 1912. Paul Karl Moritz Knipping, expérimentateur (1883-1935) Etudiant en thèse dans le laboratoire de Röntgen en 1912. III – Diffraction des rayons X La découverte L’expérience (avril - juin 1912) Cristal de Blende ZnS III – Diffraction des rayons X La famille Bragg Octobre 1912, article de W.H. Bragg : “ les rayons X sont des particules qui passent dans des canaux définis par les atomes du cristal ”. William Henry Bragg (1862-1942) Novembre 1912, W.L. Bragg publie, à 22 ans, un article fondateur “The diffraction of short electromagnetic waves by a crystal” qui réinterprète correctement les données de Friedrich et Knipping … sans mentionner les rayons X pour ne pas s’opposer à son père! Loi de Bragg : 2 d sin(θ θ)=nλ λ William Laurence Bragg (1890-1971) Reçoivent le prix Nobel de Physique « pour leurs travaux d'analyse des structures cristallines à l'aide des rayons X » en 1915 III – Diffraction des rayons X La loi de Bragg Voici une description du modèle de Bragg lorsque des atomes de type différent sont localisés sur des plans parallèles avec un espacement ∆d. Cette séparation entre les plans vert et bleu crée des interférences et des différences de phase entre les rayons réfléchis conduisant à des changements dans les intensités. Ces modifications d’intensité vont fournir les informations sur la structure atomique du cristal étudié. III – Diffraction des rayons X La sphère d’Ewald ghkl= 2/λsinθ d = 1/ghkl λ = 2x1/ghkl sinθ λ = 2d sinθ Le rayon incident, de longueur d’onde λ, « construit » une sphère d’Ewald imaginaire de diamètre 2/ λ. Le réseau réciproque tourne lorsque le cristal lui-même est en mouvement. Chaque fois qu’un point du réseau réciproque traverse la surface de la sphère d’Ewald, un rayon diffracté est généré depuis le centre de la sphère. III – Diffraction des rayons X Les outils Les diffractomètres Géométrie Kappa III – Diffraction des rayons X Les outils III – Diffraction des rayons X Les données Voici deux images de diffraction obtenues sur un diffractomètre à détecteur CCD. Lors d’une mesure sur un cristal, on va enregistrer plusieurs centaines d’images. Bon cristal Cristal imparfait III – Diffraction des rayons X Les résultats : structures inorganiques simples Structure cubique à faces centrées: NaCl Motif: Cl (0,0, ½) Na (0, 0, 0) Structure cubique simple: CsCl Motif: Cl (0,0,0) Cs (½, ½, ½) Structure cubique centré: Fe Motif: Fe (0,0,0) III – Diffraction des rayons X Les résultats : structure organométallique plus complexe Vue de la molécule isolée Vue de la molécule dans la maille élémentaire III – Diffraction des rayons X Les résultats : structure de l’ADN Rosalind Elsie Franklin (1920-1958) King’s College, Londres Structure de la double hélice Cliché de diffraction X III – Diffraction des rayons X Les résultats : structure de l’ADN En 1962, le prix Nobel de médecine a été conjointement attribué à Francis Crick, James Watson et Maurice Wilkins pour leurs découvertes sur la structure moléculaires des acides nucléiques et sa signification pour la transmission de l'information pour la matière vivante. III – Diffraction des rayons X Relations Structures Propriétés Diamant Que du Carbone C Graphite III – Diffraction des rayons X Relations Structures Propriétés : la chiralité En 1848, Pasteur remarque que des cristaux d'acide tartrique, du type de ceux produits lors de la vinification du raisin, peuvent avoir deux formes identiques mais non superposables, images l'une de l'autre dans un miroir. Soumettant une solution de chaque type de cristaux à un faisceau de lumière polarisée il observe que la déviation du plan de la lumière polarisée est différente suivant la forme des cristaux. Une espèce dévie la lumière à droite (dextrogyre) et l’autre à gauche (lévogyre). Un mélange des deux en proportion égale n’influence pas la lumière polarisée. la dissymétrie de la forme cristalline correspondait à une dissymétrie interne de la molécule, et donc la molécule en question pouvait exister sous deux formes dissymétriques inverses l'une de l'autre. Les travaux de Pasteur ont abouti quelques années plus tard à la notion de stéréochimie des molécules III – Diffraction des rayons X Relations Structures Propriétés (R)-limonène orange (S)-Iimonène citron III – Diffraction des rayons X Relations Structures Propriétés (S) -Ibuprofène (R) -Ibuprofène Enantiomère R Enantiomère S Antalgique et antirhumatismale Aucune action III – Diffraction des rayons X Relations Structures Propriétés Thalidomide: médicament de confort utilisé pour traiter les nausées matinales des femmes enceintes dans les années 50 – 60. O O N N O O Enantiomère R Enantiomère S O N H O O N H O La molécule existe donc sous forme de deux énantiomères R et S. Comme les deux formes sont interconvertibles in vivo, l’effet tératogène n’aurait pas été évité en n’administrant qu’une seule des deux formes. IV - Conclusion La cristallographie dans notre vie quotidienne Et d’abord le quartz : Du sonar (Sound Navigation And Ranging), Paul Langevin, 1er guerre mondiale… … aux montres à quartz IV - Conclusion La cristallographie dans notre vie quotidienne Des cristaux pour les lasers : Laser à rubis Ecran LCD (Liquid Crystal Device) IV - Conclusion La cristallographie dans notre vie quotidienne Micro électronique Silicium Transformer l’énergie solaire en énergie électrique Cellules photovoltaïques à base de silicium IV - Conclusion La cristallographie dans notre vie quotidienne Etudier la structure des molécules actives et « voir » les sites cibles mis en jeu lors de leurs actions => tester de nouveaux médicaments